Au départ
Après 19h de bus au départ de Mulhouse, me voici arrivé dans cette urbanisme très dépaysant, où immeubles en ruines côtoient bureaux ultra-modernes. Là-bas, je retrouve plusieurs amis français en exil bruxellois qui respectent la tradition de la troisième année d’étude de la section Image de l’INSAS, et avec qui je vais vivre une semaine incroyablement riche en enseignements et en rencontres…
Tarifs étudiants
J’en profite tout d’abord pour souligner l’accueil et l’organisation exemplaires : le festival est vraiment l’évènement de l’année pour cette ville industrielle qui était le centre textile le plus important d’Europe au début du 20e siècle (visitez absolument la Manufaktura, gigantesque centre commercial dans une ancienne manufacture). L’hébergement des étudiants est par exemple assez ingénieux : après s’être inscrit sur Internet avant la manifestation, les organisateurs vous mettent en contact avec un habitant qui se propose de vous accueillir gratuitement, en échange de quoi celui-ci reçoit du festival une accréditation pour en profiter aussi!
Image-Forum
Après le comparatif de la BSC qu’Aurélien a très bien résumé, nous avons droit à de la publicité pour un site Internet anglophone qui s’appelle Image-Forum, et qui fourmille d’informations techniques intéressantes, notamment sur les workflows (adresse web en fin d’article). N’hésitez pas à y faire un tour!
Coup de cœur
Io, Don Giovanni, de Carlos Saura et photographié par Vittorio Storaro en clôture de la sélection officielle (petit coup de gueule au passage contre le bon gros quart d’heure de publicités à l’écran avant le début de chaque film en compétition). Même si c’est en italien, que je ne maîtrise pas, et sous-titré polonais, je me prends une bonne claque. Ce film est remarquable en de nombreux points, notamment par sa maîtrise des notions de mise en image et en lumière. Cela ne m’étonne pas concernant le grand Monsieur derrière la cellule (petit rappel exhaustif de la filmographie de Vittorio Storaro: Apocalypse Now, Le Dernier Tango à Paris, Le Dernier Empereur, …). Le film parle de la création de l’opéra éponyme, ainsi que de ses créateurs, Wolfgang Amadeus Mozart pour la partition et de Lorenzo da Ponte pour les textes.
Ici, Vittorio Storaro ne cache pas son plaisir de faire une lumière non-réaliste et magnifiée. Justement: il va plus loin et pose la question de l’éclairage et de la barrière entre l’imaginaire et la réalité lorsque, volontairement, il inverse progressivement les techniques de l’opéra avec celles du cinéma… Vers la demi-heure de film, lorsque les protagonistes arrivent à Prague, on s’amuse à repérer une feuille de décor (peinture sur toile) d’une façade de maison bouger avec le vent (certainement était-elle mal fixée se dit-on). Il n’en est point. Petit à petit, les décors en studio, les découvertes, et tous les autres artifices, sont de moins en moins camouflés, et la réalité devient un véritable décor d’opéra. De même, des vidéos de lave en fusion sont rétro-projetées sur scène dans l’opéra lui-même, comme si le cinéma couleur existait déjà en 1787… Autre audace: les transitions en fondus enchaînés entre la réalité et l’imaginaire des créateurs de l’opéra se font en direct! Le deuxième décor se cache derrière la toile peinte du premier, et celle-ci devient progressivement translucide lorsque le chef électro, simultanément sur « dimmer », éteint les lumières du premier décor et allume celles du deuxième!…
A la fin, conférence de presse à la suite de la projection avec les deux auteurs, où on a l’impression d’être en différé avec le podium (Carlos Saura répond en espagnol, traduit ensuite en polonais par une attachée de presse, pour l’entendre enfin en anglais de la bouche de l’animateur local de la rencontre…). Vittorio Storaro nous parle de ses intentions et de cette question qu’il se posait au début du tournage: « Quelle porte je peux encore ouvrir pour la créativité? », dans une salle pleine à craquer et ridiculement petite pour accueillir une rencontre comme celle-ci…
Générique de fin ?
J’en ai aussi profité pour jeter un œil à cette école de cinéma au nom imprononçable (PWSFTViT: Panstwowa Wyzsza Szkola Filmowa, Telewizyjna i Teatralna) située dans la même ville et à la réputation internationale, ainsi que d’un dernier jour après la clôture du festival pour immortaliser quelques images qui sont dans cet article.
Puis retour en France tout aussi dépaysant et rocambolesque: suite à une erreur d’indication d’horaires, me voici dans un taxi roulant à 180km/h pendant 120km pour rattraper mon bus!
Le Rappel (Na zdrowie !)
Pour résumer, ce festival est une aubaine pour tous les amoureux de l’image de film qui veulent en savoir plus et rencontrer leurs semblables: workshops, masterclass, projections, séminaires, tout est fait pour partager ses expériences et découvrir celles des autres! Ceux qui ne sont pas totalement à l’aise avec l’anglais peuvent se rassurer : ils ne sont pas seuls. Malgré le temps de réflexion dans la gymnastique des langues lorsqu’on prend des notes pendant les conférences, les conversations passionnelles ne demandent qu’à savoir faire les bon gestes pour être compris!
Et pour ceux qui seraient encore indécis, si je vous dis que tout le monde (je dis bien tout le monde) se retrouve le soir pour manger, échanger et danser, apprécier la fameuse boisson polonaise qui se sert dans des petits verres, et que la beauté féminine de ce pays n’est absolument pas un mythe?
Ah, là je vous sens un peu plus attentifs…
Then, see you this year at Plus Camerimage Festival !