Avec la confo cadre, c’est à chaque fois les mêmes questions !!
Durant les essais, combien de mètres envoyer pour la confo cadre au laboratoire ? Une longueure de 122m, est-ce exagéré ? Faut-il envoyer directement la confo cadre avec les essais, ou avec les premiers rushes ? Et que devient-elle ensuite? Comment est-elle utilisée par les laboratoires dans les chaînes de post-production ? Pourquoi arrive-t-il que les flèches soient rognées au télécinéma, et que l’on ne puisse rien y faire ? De même lors d’une projection sur écran !!
Durant mon parcours, j’ai pu constater que les méthodes et les avis divergeaient selon les assistants. Beaucoup trop de questions restaient sans réponse. Afin d’y voir un peu plus clair, Jean-Baptiste FONTANAROSA, responsable de fabrication chez TELETOTA Post Modern, Alain BESSE, responsable secteur diffusion à la CST, et les gens du laboratoire ARANE GULLIVER ont accepté de répondre à mes questions.
Cette enquête est rédigée non sous forme d’entretien mais sous forme d’une synthèse question/réponse. Bien que toutes les questions posées ci-dessus concernent majoritairement la confo cadre argentique, la confo cadre numérique (K7, Data…) sera elle aussi traitée en fin, mais plus succinctement. Beaucoup d’évidences et beaucoup de rappels lors de cette enquête, mais ils sont nécessaires pour les lecteurs non spécialistes.
La Confo Cadre argentique (35mm, Super 16mm)
1. Lors des essais caméra
Qu’est ce qu’une CONFO CADRE ou Conformité de Cadre ?
La Conformité de cadre “a pour but de vérifier la similitude entre cadre visé et image impressionnée. A l’aide de marques triangulaires (« pointes », ou « flèches ») placées sur les bords du cadre, on matérialise à la prise de vue la gravure du dépoli. Après développement, on relit l’image au microscope et on vérifie l’exactitude de l’alignement dépoli/fenêtre.”
[Extrait du Guide de l’image, paragraphe sur la vérification de la visée, de François REUMONT (http://www.hypergonar.com/)]
Une fois vérifiée au compte-fils (1 photogramme suffit), la conformité de cadre doit être renvoyée au laboratoire, cette fois-ci définitivement. Elle servira au calage des machines, et aux différentes étapes de la post production.
L’envoi de la CONFO CADRE au laboratoire peut se faire lors des essais, ou avec l’envoi des premiers rushes le premier jour de tournage. Mais pas plus tard, c’est important !! Si l’envoi de la confo cadre se fait le troisième jour de tournage, les rushes passés au télécinéma les premiers jours risqueraient d’être mal cadrés.
Lors de la fabrication de la conformité de cadre, faut-il aligner les flèches (marques triangulaires, ou pointes) sur : l’intérieur du tracé, l’arête extérieure ou l’arête intérieure du tracé du dépoli ?
La réponse des loueurs est: sur l’arête intérieure du tracé.
Combien de mètres de confo cadre faut-il envoyer au Laboratoire ? 122m est-ce exagéré ?
Il faut assez de métrage pour mettre en tête de chaque bobine de négatif constituée par le laboratoire, “LAB ROLL”. Suivant les rushes fournis, la “LAB ROLL” peut mesurer jusqu’à 600m, et pour chaque bobine, ce sont 4 secondes de confo cadre, 35mm ou 16mm, qui sont utilisées.
En général, les labos demandent 122m pour un long-métrage, 50m pour un téléfilm, et 30m ou moins pour les projets plus courts tels que courts-métrages, clips et pubs.
• Exemple 1 •
Imaginons un tournage de long-métrage en 35mm (4 perfos), avec 36 jours de tournage. Il n’y a qu’une seule caméra. Sa consommation en pellicule journalière est de 1200m/j. Chaque jour, au laboratoire seront constituées 2 “LAB ROLLS” de 600m.
En 35mm 4 perfos, à une cadence de 24i/s, 4 secondes représentent 2m de pellicule. À mesure de 2 LAB ROLLS constituées par jour pendant 36 jours de tournage, on arrive à 144m de conformité de cadre utilisés.
[NB. Pour un tournage en 3 perfos, il faut enlever 25% du métrage.]
• Exemple 2 •
Imaginons un tournage de téléfilm en S16, à deux caméras, avec 23 jours de tournage. Sa consommation en pellicule journalière est de 1200m/j. Deux conformités de cadre sont utilisées, une pour chaque caméra. Les deux caméras ont tourné le même métrage. Chaque jour, au laboratoire seront constituées 2 “LAB ROLLS” de 600m qui correspondront à chaque camera.
En S16, à une cadence de 25i/s, 4 secondes représentent un peu moins d’1m de pellicule. À mesure de 2 LAB ROLLS constituées par jour pendant 23 jours de tournage, on arrive en arrondissant à 46m de conformité de cadre utilisés au total. Vu qu’il y a une conformité de cadre pour chaque camera, on obtient 2 bobines de confo cadre de 23m.
Ces exemples montrent bien que la demande en confo cadre des laboratoires n’est pas déraisonnable, au contraire !!!
Ils démontrent aussi que nombre de facteurs sont à prendre en compte : format de la pellicule, format d’impression, nombre de jours de tournage, nombre de caméras, consommation journalière, vitesse… Et ne l’oublions pas, la confo cadre est destinée à être utilisée encore dans d’autres occasions lors de la post-production.
De ce fait, il n’y a pas vraiment de règles… Ou peut-être une seule :
“Qui peut le plus, peut le moins !!”
Que se passe-t-il lorsque les laboratoires sont à court de confo cadre ?
Il arrive parfois pendant les tournages que les laboratoires appellent les assistants caméras pour qu’ils ré-impressionnent une nouvelle confo cadre faute de ne plus en avoir.
Ce cas de figure arrive plus particulièrement en long-métrage tourné en 35mm. Très souvent lors des essais caméra, les assistants n’ont plus de pellicule et impressionnent la conformité de cadre sur des chutes dont les tailles varient entre 20 et 40m. Pour le travail à réaliser en laboratoire, ce métrage est clairement insuffisant.
Si le laboratoire est équipé d’une TRUCA, il lui est possible de ré-impressionner au rapport 1/1 un interpositif de la confo cadre à partir d’un seul photogramme du négatif original. L’avantage est de pouvoir continuer à garder la même référence sur toute la durée de la post-production. Seulement cette manipulation monopolise la machine et son opérateur pendant un temps donné. Cela a un coût. Et tout le monde pourrait s’en passer.
Si le laboratoire n’est pas équipé d’une TRUCA, il n’a alors pas d’autre choix que d’appeler les assistants opérateurs. C’est ce qui se passe la plupart du temps. L’inconvénient est d’obtenir deux références pour un même film, car la confo cadre réalisée pendant le tournage ne sera jamais parfaitement identique à la première.
2. Au Laboratoire
La conformité de cadre est-elle utilisée ailleurs qu’en tête des LAB ROLLS ?
Les LAB ROLLS représentent une grande partie de son utilisation. Mais les laboratoires l’utilisent aussi dans d’autres circonstances.
Lorsqu’il y a extraction par exemple, dans le but d’une projection de rushes. Des plans sont extraits du négatif original et assemblés à la conformation. La bobine obtenue est ensuite solidarisée avec une amorce en début et fin. Comme pour les LAB ROLLS, 4 secondes de confo cadre seront là encore placées en tête de bobine.
Pour une préparation des négatifs destinés au scan, pour des tirages tests, à la réalisation de la copie de travail, le même scénario se répétera.
Dans le cas de gonflage à la TRUCA du S16 en 35mm, ou passage du 3 au 4 perfs, un seul photogramme de la confo cadre sera utilisé.
Comment est-elle exploitée dans les machines de post-production ?
Le scanner
Si scan il y a, les négatifs auront été au préalable conformés avec des amorces et de la confo cadre par la conformation au laboratoire. Toute la surface de chaque photogramme, la confo cadre y compris sont ensuite scannées et numérisées au plus large à l’aide de fenêtres normalisées (ex : SMPTE ou CST).
Pendant toute la durée de la post-production, le projet sera traité Full Frame afin de disposer du maximum d’informations, et un fichier Data de la confo cadre sera accessible en réseau et disponible à chacun. Un « blanking » , déterminé en fonction de la confo, sera appliqué sur les différents rendus et accompagnera les images suivant les besoins de chaque étape. C’est lors des finitions, à la conformation du master numérique que la conformité de cadre intervient une fois pour toutes. Le calage du cadre est alors réalisé au plus proche de la confo dans le respect du ratio de projection du film. Des retouches et recadrages pourront tout de même être opérés lors de la session d’étalonnage si besoin est.
Quand arrive l’heure du retour sur film sur un internégatif avec un imageur (ex : ARRI LASER), le master numérique livré doit être normalement prêt à être shooté et ne nécessite pas de recadrage. À l’aide de caches normalisés, l’image sera centrée sur l’intermédiaire.
Le télécinéma “TC”
En général, les télécinémas utilisés sont des « SPIRITS », mais il en existe d’autres. La même machine peut accueillir le S16 et le 35mm, à condition de changer les têtes. Aujourd’hui, tous les rushes passent au télécinéma.
Une fois la LAB ROLL chargée dans le TC, on visionne la confo cadre placée en tête de bobine. Le positionnement du cadre ne se fait pas sur une image arrêtée mais en mouvement. D’où les 4 secondes à chaque fois.
Pour caler le cadre, l’opérateur ou l’étalonneur joue dans un premier temps sur le « Framing », c’est le calage de la hauteur de l’image dans la fenêtre du TC. Puis, dans un deuxième temps, il joue sur le zoom, et utilise des volets latéraux. C’est ce qu’on appelle le « Blanking ».
Les ratios obtenus sont contrôlés à l’oscilloscope. L’opération consiste à compter le nombre de lignes dans l’image. Les mires de cadre électroniques obtenues par la machine sont par conséquent toujours bonnes.
Mais alors ? Pourquoi il arrive que les flèches soient rognées au télécinéma ?
C’est un cas de figure récurrent. Cela arrive plus souvent en S16 qu’en 35mm. Soit ce sont les pointes latérales qui sont rognées, soit ce sont les pointes haut/bas. Il peut y avoir plusieurs raisons à cela.
Bien que l’impression de la confo cadre faite par l’assistant caméra soit parfaite, si l’on se fit à l’oscilloscope du TC, il est fréquent que le ratio obtenu sur le calage des flèches soit faux (??).
Plutôt que d’opérer un changement dans la géométrie de l’image, certains laboratoires préfèrent se fier à leur oscilloscope et délivrer des rushes au bon ratio.
Il n’est pas impossible de respecter la confo cadre même si son ratio est erroné. C’est le cas d’autres laboratoires qui estiment que c’est le travail du cadreur qui prime.
Dans le cas d’une production en S16, du visionnage des rushes jusqu’au PAD, tout ira bien.
Dans le cas d’une production en 35mm avec tirage à partir du négatif, la surprise interviendra plus tard lors de la projection. Alors que les rendus du télécinéma ne montraient aucune anomalie, la projection en sera quant à elle révélatrice.
Dans l’absolu, s’il y a un doute sur le bon ratio, le laboratoire peut monter une mire CST en tête au télécinéma pour montrer les différences entre cette dernière et la confo cadre. Dans tous les cas, la mire CST fait foi ; qui plus est, c’est la même mire qui sert au calibrage des machines, et qui valide les projections.
Autre raison à ce phénomène de rognage, il peut arriver aussi que le champ d’impression soit trop au bord du photogramme. Pour échapper à un vignetage possible, et aux arrondis présents dans les angles de l’image, conséquence intrinsèque à certaines fenêtres d’impression, les laboratoires réduisent le cadre tout en préservant le ratio.
3. En salle de projection
La C.S.T. ? Qu’est-ce que c’est ?
La CST, Commission Supérieure Technique de l’image et du son, est une association Loi 1901 crée en 1944 pour « reconstruire le cinéma français », et « favoriser le passage du noir et blanc à la couleur ». (Voir la présentation de la CST : http://www.cst.fr/)
En rassemblant toutes les professions du cinéma, elle se donne pour mission depuis sa création, de créer le lien de la production jusqu’à la projection, de la captation des images à leur exploitation et diffusion.
Dans cette optique, au fur et à mesure des années et des recommandations, une normalisation internationale des ratios et des formats a été votée. Il s’agit de la normalisation ISO (International Standard Organisation) qui date pour certains ratios du cinéma argentique depuis les années 50. Le format 1.85 fut quant à lui normalisé, il y a 25 ans.
En projection, le champ d’image projeté est toujours plus petit que le champ d’image impressionné. Il est toléré une amputation par bord de 2%. Les normes impression et projection ne sont donc pas les mêmes, mais restent étroitement liées.
Pour chaque taille de fenêtre, il n’existe qu’une seule taille d’impression, qui varie selon les supports : 35mm 4 perfos, 35mm 3 perfos, S16 ou 70mm…
À cet effet, les laboratoires et les salles de projection utilisent des mires standard CST calibrées selon les normes ISO pour régler les machines. Et encore une fois, il n’existe qu’un seul standard pour chaque format.
Moyennant finance, les normes ISO peuvent être téléchargées ou commandées :
Ces documents sont officiels et interdits à la reproduction. Néanmoins voici quelques mesures :
Comment le projectionniste cadre sa projection ?
Alors qu’au télécinéma, il était possible de recadrer une image en jouant sur un zoom et des volets latéraux, le projectionniste, lui, n’a qu’une seule possibilité de recadrage : faire varier le cadre de haut en bas pour caler la projection sur la toile. Attention, il n’existe pas de mire de cadre sur les copies d’exploitation.
Pour régler sa projection, le projectionniste installe la fenêtre correspondant au format de prise de vues du film et ajuste la hauteur de projection avec une bobine de mire CST. S’il n’a pas le temps, ou s’il n’a pas de mire CST, il utilisera les caractères inscrits sur l’amorce de la bobine pour centrer à peu près l’image. Le fameux décompte 5, 4, 3… Et Start.
Les surprises !!! ???
Au laboratoire, en salle de projection:
Il est fort désagréable de découvrir durant une projection de rushes que la confo cadre du film est plus rognée à droite qu’à gauche. Pourtant au télécinéma, le problème était inexistant.
Ce n’est pas la faute de la projection, et le projectionniste ne peut rien y faire.
Il faut se dire que la confo cadre n’était malheureusement pas parfaitement centrée gauche/droite à l’impression.
En salle d’exploitation :
Il est rare, mais cela arrive parfois, de voir en salle des micros « flirter » avec le cadre au-dessus des comédiens.
Il est moins rare, mais cela arrive aussi parfois, de voir en salle des gros plans qui décapitent de trop près le front des acteurs.
Pourtant au tournage, la conformité de cadre était correcte à tous niveaux. Elle était centrée, à l’équerre, et le champ d’impression était juste.
Au tirage par contact, toute la surface impressionnée sur le négatif le sera aussi sur le positif. Il faut comprendre par là que si l’impression est « full » sur le négatif, elle sera « full » sur le positif. Avec un tel positif, si le film destiné à être projeté est au format 1.85, le projectionniste aura donc la possibilité de déplacer le cadre dans la hauteur. Étant donné qu’il n’existe pas de mire de cadre sur les copies d’exploitation, ces problèmes en salle peuvent être les conséquences d’un mauvais réglage de la projection, ou de « l’humeur » du projectionniste.
L’utilisation de la bande cache
Imaginons toujours un tournage en 35mm 4 perfos. Le cadre choisi pour la prise de vues est le 1.85. Et la fenêtre d’impression est au ratio ACADEMY 1.37.
Comme nous l’avons vu précédemment, au tirage par contact, toute la surface impressionnée sur le négatif sera elle aussi insolée sur le positif. Seulement la production désire avoir sur ces positifs d’exploitation uniquement la surface impressionnée par le cadre du cadreur.
Pour recadrer et obtenir un positif sur lequel se trouve uniquement la surface utile, la solution est d’utiliser une bande cache lors du tirage. La bande cache se présente sous forme de bobine de 35mm de large.
– Si la tireuse est à tirage continu, deux passages du positif dans la machine sont nécessaires.
Au 1er passage : le positif est insolé par les lumières de tirages par contact avec le négatif.
Au 2e passage : la bande cache remplace le négatif et préserve d’une seconde exposition la surface utile encore latente sur le positif. La surface extérieure au cadre du film est alors insolée une seconde fois.
– Si la tireuse est à tirage alternatif, un photogramme de bande cache suffit au deuxième passage.
Il résulte de cette opération le noircissement de la surface inutile de l’image qui se confondra avec l’inter-image. Cela permet entre autres en projection d’éviter les décadrages maladroits.
Et le Scope dans tout ça ??
Soulevons un problème d’actualité. Aujourd’hui, deux ratios scope de prise de vues se partagent les tournages. Il y a le 2.35 européen, et il y a le 2.40 (2.39) américain. Longtemps, du tournage jusqu’à la diffusion, le 2.35 a été le ratio de prédilection. Mais depuis Octobre 2000 le standard de projection pour le scope est passé au 2.39.
Souvent les opérateurs n’en tiennent pas compte, mais il ne faut surtout pas s’y tromper. Imaginons un tournage qui choisit comme format de prise de vues le 2.35. En projection, le standard 2.40 étant plus étroit dans la hauteur, les flèches de la confo cadre s’avéreront coupées.
Nous avons là le « premier effet KISS COOL ».
Rappelons que l’inter-image en 2.35 est très mince. À la conformation, les collures sur le négatif sont dans ce cas un vrai problème. De même pour les déclenchements des lumières de tirage ; si les changements d’insolation sont trop importants, les lumières risquent de baver légèrement entre deux photogrammes. Pour éviter cela, le format de projection a donc été modifié, et le 2.39 a été standardisé.
En télé, les diffuseurs sont actuellement en pleine transition du 2.35 au 2.39. Les dernières recommandations concernant les livraisons des PAD aux diffuseurs viennent d’être signées. Étant donné que le PAD de notre tournage est fabriqué à partir d’un interpositif en 2.35, les collures et les déclenchements que l’on ne voyait pas à la projection, pourraient suivant le diffuseur apparaître ou non à la télévision.
Nous avons là le « deuxième effet KISS COOL ! »
4. La confo cadre parfaite
Aux essais…
“IL FAUT TENIR COMPTE DES CONDITIONS DE PROJECTION!”
Et pour cela, il faut bien choisir son dépoli à la base. Pour être sûr d’une bonne impression, il est primordial d’avoir une conformité de cadre centrée et à l’équerre. Cela implique aussi un positionnement symétrique et perpendiculaire des flèches. Peu importe la pellicule utilisée, et peu importe l’exposition, du moment que la confo cadre est correctement visible (une pellicule périmée peut faire l’affaire).
Les mires de point, et les chartes ne sont pas indispensables. En projection et au télécinéma, le point est fait sur le grain de la pellicule.
Pour vérifier votre dépoli, mesurez au compte-fils les ratios et le champ d’impression. Les laboratoires quant à eux préconisent de comparer le tracé du dépoli avec une mire de cadre CST. Voir même d’impressionner la mire, et de l’utiliser comme confo cadre définitive. Il faut bien entendu pour cela que le tracé du dépoli et la mire CST concordent. Si ce n’est pas le cas, on ouvre le débat !!!?
Dans le cadre d’une post-production argentique en 35mm avec tirage par contact, il est préférable d’impressionner au plus près ce qui est cadré par l’opérateur. Comme il en a été question précédemment, les fenêtres “Full” sont à éviter en projection.
Dans le meilleur des mondes, il faudrait, pendant la période des essais camera, pouvoir dans un premier temps faire un passage de la confo cadre dans le télécinéma, et ensuite en faire un tirage pour regarder son comportement en projection. Cela permettrait de valider le dépoli sur toute la chaîne. C’est un idéal qui peut être réalisable lorsque des essais keylights ou des essais maquillage/costumes sont organisés au début des essais caméra.
Que faut-il faire lorsqu’il y a plusieurs caméras ?
Si les conformités de cadre sont identiques et superposables, une seule suffit.
Si les confos ne correspondent pas, alors il en faut une par camera. Circonstances à éviter absolument si la post-production est une fois de plus argentique. Des sautes de cadre apparaîtraient dans une même séquence où les deux caméras seraient montées ensemble. Défaut que l’équipe pourrait découvrir seulement une fois le film monté à la projection de la copie 0.
Enfin, s’il s’agit d’un tournage avec deux caméras identiques équipés chacune du même dépoli, il est moins sûr d’avoir la même génération de fenêtre. Alors méfiance aussi sur ce point !!
5. Chez les loueurs
Les différents Standards
Chez le loueur, les dépolis et fenêtres d’impressions sont multiples, et chaque fabricant : Panavision, ARRI ou AATON, possède ses propres standards. Entre deux caméras de marques différentes, les dépolis et les fenêtres ne sont pas interchangeables, mais ils répondent aux mêmes normes. Il y a la norme ISO (International Standard Organisation) dont il a déjà été question pour la projection, il y a la norme DIN ( Deutch Industry Norm) et il y a aussi la norme ANSI (American National Standard Institute).
Afin de faire bref, les standards concernant le S16 ne seront volontairement pas traités.
– Pour y voir un peu plus clair, passons au crible les standards ARRI & ARRICAM pour le 35mm :
1. Le standard N35 (Normal)
Il s’agit de notre bon vieux standard sonore. L’impression maximale en largeur de l’image sur le négatif mesure 22mm. Chaque ratio, et chaque champ d’impression décliné du standard N35 répond aux normes ISO.
2. Le standard DIN Super 35 (DIN S35)
Ce format a été créé à l’origine dans les années 50 dans le but d’utiliser une largeur maximale de 24mm sur le négatif en se servant de la place qui était réservée à la piste sonore. Par la suite, il fut standardisé sous la norme DIN ( Deutch Industry Norm).
La particularité du standard DIN S35 est de laisser un espace disponible entre les perforations et l’image pour l’impression du LTC (sorte de code barre) avec les caméras ARRI 435 et 535.
3. Le standard ANSI Super 35 (ANSI S35)
Pour faire une meilleure utilisation de la surface disponible sur le négatif, la surface utilisable pour l’impression fut élargie à 24,9mm. Ce format fut standardisé dans les années 90 sous la norme ANSI (American National Standard Institute).
Voir le catalogue des dépolis ARRI :
http://www.arri.de/fileadmin/media/arri.com/downloads/Camera/
– Les standards PANAVISION
Panavision possède deux standards de dépolis et fenêtres : le standard 35mm qui répond aux normes internationales (ISO), et le standard Super 35 qui est quant à lui standardisé sous les normes ANSI.
Voir les dépolis PANAVISION :
http://www.panavision.com/ground_glass.php
– Les standards AATON & MOVIECAM
AATON et MOVIECAM reproduisent le même schéma que Panavision pour le 35mm.
Voir les dépolis AATON :
http://www.aaton.com/files/viewing_screens16.pdf
http://www.aaton.com/files/screen35_all.pdf
Tous les dépolis sont tracés en commande numérique, et les machines de fabrications sont précises au 1/100 près. Les tracés et les ratios obtenus sont par conséquent toujours corrects.
Mais qu’en est-il du champ d’impression ? Comme nous l’avons vu précédemment, pour chaque taille de fenêtre de projection, il n’existe qu’une seule taille d’impression qui varie selon les supports (35mm 4 perfos, 35mm 3 perfos, S16 ou 70mm). Qui plus est, le champ de projection en salle et le champ d’impression sur la pellicule ont peut-être le même ratio, mais n’ont pas la même surface.
Est-il possible pour un même ratio que la surface impressionnée ne soit pas la même entre deux marques de caméras ?
Question bête, réponse bête. Il est peu probable que cela arrive. La normalisation des formats de prise de vues permet justement d’éviter de ce genre de circonstances, et la conversion imperial/métrique des normes n’engendre pas de telles conséquences.
En revanche, que ce soit chez n’importe quel fabricant, ou marque de caméra, nombres de dépolis sont tracés « projection ». Les dépolis avec tracé « projection » avaient fait leur apparition suite à la demande des opérateurs américains qui désiraient avoir uniquement dans leur viseur le cadre de l’image finale ; en d’autre terme, uniquement ce qui serait visible en projection.
L’amalgame des tracés « impression » et « projection » entre deux dépolis d’un même ratio peut alors expliquer ces différences de surface d’impression, même entre deux caméras d’une même marque.
Un autre détail important peut aussi faire défaut à l’assistant caméra : la fenêtre et les masques d’impression.
Les cas de figures qui vont suivre sont des cas particuliers, et n’invitent surtout pas à banaliser l’ensemble du parc des dépolis.
Prenons encore une fois l’exemple d’un tournage en 1.85 en 35mm (N35). Le dépoli fourni contient un tracé désigné comme étant le tracé 1.85, et un autre tracé plus large que le précédent et aux coins arrondis.
Il ne faut pas s’y méprendre, ici le tracé désigné 1.85 correspond au tracé « projection », et mesure 21mm x 11,3mm. D’après ces informations, si on calcule le ratio de ce tracé on obtient bien un ratio 1.85 (1,858 pour être plus précis). Faisons la même chose pour le deuxième tracé plus large, et calculons son ratio : 22/11,9= 1,848, soit 1,85. Les deux tracés sont au bon ratio.
Ce deuxième tracé pourrait alors correspondre au tracé « impression » du 1,85, mais ce n’est pas le cas. Ce deuxième tracé désigne le champ d’impression de la fenêtre et/ou du masque (camera aperture) qui lui sont associés. Alors méfiance !!
Avec un dépoli 1.85 ANSI S35, l’explication est encore plus flagrante.
À présent, le tracé projection mesure 24mm x 13mm. Le ratio est donc de 1,85 (soit 1,846 pour être plus précis). Le deuxième tracé mesure quant à lui 24,9mm x 13,9mm. Le ratio obtenu, si on fait le calcule, est égale à 1,79. Le masque associé à ce dépoli n’est donc en aucun cas un masque 1,85 « impression ».
Avec l’avènement des scans 2K ou 4K, des PAD HD et des masters numérique, les tracés « projection » sur les dépolis sont-ils encore vraiment utiles ? Ne faudrait-il pas tout le temps privilégier le cadre « impression » ?
Si la confo cadre fournie au laboratoire désigne le tracé « projection », la perte en information n’est pas négligeable. Au contraire, la surface perdue sur le négatif pourrait être mise à contribution.
Aujourd’hui, les fabricants proposent un service de fabrication des dépolis à la demande. Seulement il faut compter un délais de 6 mois pour la fabrication, et encore une fois, cela à un coût.
Exemple chez ARRI :
Et pour le 70mm ???
- Etat des lieux
Aujourd’hui, deux laboratoires se partagent la quasi-totalité des tournages en 70mm (65mm en prise de vues). Il existe un laboratoire aux Etats-unis, et nous avons en France le laboratoire ARANE GULLIVER.
Exceptés aux Etats Unis, en France les rushes 65mm ne passent pas dans un télécinéma. On pratique plutôt une réduction du 65 en 35mm qui est ensuite projetée. Cela permet entre autres d’avoir une visibilité des rushes de meilleure qualité, et de pouvoir déceler plus facilement des problèmes tels que l’instabilité.
En France, la chaîne entière de post-production 70mm est réalisée en argentique.
- Et la conformité de cadre dans tout ça?
Pour les tournages en 70mm, 65mm en prise de vues, sauf cas vraiment exceptionnel, il n’y a jamais de confo cadre fourni aux laboratoires par les assistants.
Trois raisons majeures :
1. La pellicule coûte très chère.
2. Les cameras utilisées pour ces tournages se trouvent chez les loueurs Américains et Allemands. Parce qu’ils réalisent eux-mêmes leurs essais, ces derniers garantissent le bon fonctionnement et réglages des caméras.
3. Il n’existe que trois tailles d’impression liées au format : le 5 perfos, le 8 perfos et le 15 perfos (IMAX et OMNI MAX) ; et les films sont toujours tournés “Full Frame”.
Si le film n’est pas destiné à être projeté sur des écrans correspondant au format de prise de vues, ce sont les laboratoires qui livrent à l’équipe de tournage une mire standard indiquant quel cadre et quelle surface il faut privilégier à la prise de vues, et donc à l’impression.
Dans le cas particulier d’un film tourné en 35mm et gonflé, ou shooté en 65mm (15 Perfos), il se pose des questions de recadrage. Faut-il caler les bords de l’image sur la hauteur, ou sur la largeur du photogramme ?
Les recadrages résultent la plupart du temps d’une étude entre le laboratoire et la production sur les salles destinées à projeter le film.
En cas de “crop” dans le photogramme 15 perfos, des tests sur des morceaux de séquences seront réalisés en amont afin de déterminer la position de l’image dans le photogramme. L’image finale sera centrée sur l’axe central vertical et encadrée de noir. Des noirs qui seront projetés en salle puisque les fenêtres de projection en 70mm sont toutes FULL FRAME.
II. La confo cadre numérique (K7, DATA)
a. Lors des essais
Comme en film, la confo réalisée dans le cadre des tournages en numérique a pour but de vérifier la similitude entre cadre visé et image enregistrée. À l’aide de marques triangulaires (pointes, ou flèches) placées sur les bords cadre, on matérialise à la prise de vues le cadre affiché dans le viseur.
En vidéo la majeure partie des films numériques est de base tournée FULL FRAME, l’essai de la confo cadre permet par conséquent dans un premier temps de visualiser l’exactitude de l’alignement entre le viseur et les écrans de références servant au tournage et à la post production (monitoring). Étant donné l’absence de réserve dans la plupart des viseurs vidéos, il est important lors de cet essai de déterminer les limites du FULL FRAME visible par le cadreur.
Lorsque les productions choisissent de tourner en 1.85, ou 2.35 par exemple, on utilise dans le viseur des « markers » électroniques qui, selon les cameras, sont réglables ou affichables par défaut. Dans ces circonstances, la confo cadre permet, en matérialisant le cadre visé, de servir de référence à la post-production pour le calage du « blanking ».
Quelques secondes d’enregistrement suffisent. Dans tous les cas, l’assistant doit fournir à la post-production une conformité de cadre enregistrée en tête de la première K7 de rushes, ou en tête des fichiers du premier disque dur.
b. Au laboratoire numérique
En post-production vidéo analogique et numérique (K7 & DATA), tout devient beaucoup plus simple, et la confo cadre n’intervient que très peu. La plupart des films étant tournée en 16/9 Full Frame, aucun calage, aucun recadrage n’est nécessaire à la conformation des rushes.
Dans le cas des productions ayant choisi de tourner dans des ratios autres que le Full Frame délivré par la camera, la confo cadre interviendra de manière définitive seulement au moment des finitions : soit à la conformation finale, soit à l’étalonnage. Pendant toute la durée de la post-prod, tout le traitement du projet sera réalisé en Full Frame afin de disposer du maximum d’informations. Selon les différents rendus, et suivant les besoins de chaque étape, un « blanking » obtenu en fonction de la conformité de cadre fournie par l’assistant sera appliqué. Si la post-production n’est pas en possession d’une confo cadre, elle appliquera un « blanking » enregistré par défaut dans les machines parfaitement centré et préservant le maximum d’information dans l’image.
Il peut arriver aussi que des recadrages, ou des zooms soient de rigueur pour échapper des éléments indésirables. Dans ce cas, il en revient au réalisateur et au DOP de valider l’opération.
Lorsque le projet est destiné à être projeté en salle (long-métrage, court-métrage, pub…), un retour sur film, ou shoot, est réalisé avec un imageur. Le master numérique livré doit être normalement prêt à être shooté et ne nécessite pas de recadrage. A l’aide de caches normalisés, l’image sera centrée sur l’intermédiaire.
Épilogue
À l’origine, il y avait l’envie curieuse et motivée de trouver des réponses à des questions récurrentes de l’assistant opérateur de prise de vues. Naïvement, c’était sans savoir que tous ces questionnements allaient apporter d’autres problématiques auxquelles il a fallu aussi répondre, ou non ?! Comment est-il possible que les ratios que nous utilisons à la prise de vues puissent être faux ? Les bandes cahes sont-elles standardisées, elles aussi ? Si le standard de projection du scope est le 2.40, pourquoi continuons-nous à tourner en 2.35 ? À quand de véritables dépolis « impressions » ?
Cette enquête a sans aucun doute acquis une valeur pédagogique au fur et à mesure de son élaboration mais ce n’en était pas le but. Cette entreprise n’a pas pour objectif de devenir une sorte de référence technique, mais seulement d’apporter des réponses, de faire un état des lieux sur les usages et pratiques des chaînes de fabrication d’aujourd’hui et d’éclaircir nombres de zones d’ombres dans nos métiers. À cet effet, elle est d’ailleurs perfectible: il reste encore beaucoup de questions et de cas de particuliers à approfondir. Le cas du 2 perfos par exemple !!
Étapes par étapes, de la prise de vues jusque la diffusion, un problème apporte souvent sa solution à un autre problème. C’est bien connu, le cinéma fonctionne « en vase communicant ». Un poil à la prise de vues disparaîtra à la projection. Cependant, comme il s’agit, à chaque production, de faire preuve de la même rigueur et de la même exigence, le travail des laboratoires et des assistants caméra est souvent remis en cause. Cette enquête permettra peut-être dans le futur d’éviter certaines circonstances fâcheuses, ou certains quiproquos entre équipe image et laboratoire. Mais surtout, et il faut l’espérer, permettra une meilleure compréhension entre les tenants et les aboutissants du travail de chacun.
Voilà, l’enquête sur la confo cadre se termine. La pause-café est bien méritée. Reste à présent à s’aérer les méninges et « recadrer » un peu tout ça. 😉
Un grand merci à toute l’équipe de ARANE GULLIVER, à Jean-Baptiste FONTANAROSA, Alain BESSE, Fred LOMBARDO, Eric GUICHARD AFC, Bernard CASSAN CST, Piotr STADNICKI, François REUMONT, Dan COHEN, Jérôme YERMIA, et Mathieu LECLERC pour m’avoir aidé et accompagné dans cette enquête.