Pour les besoins d’un téléfilm co-produit avec l’Allemagne, nous avons dû aller tester notre matériel directement chez ARRI RENTAL, la boite de location d’ARRI. Jusqu’ici, tout va bien, sauf qu’en Allemagne (en tout cas, nous concernant), les essais, c’est 2 jours ! Non négociable, point à la ligne. Nous voici donc en route pour un planning d’essais draconien où chaque minute est optimisée afin de pouvoir tout tester en 48h (je vous rassure, à l’issue de ces deux journées, on a eu 2 jours supplémentaires en France pour tout finir, mais quand même).
1re journée
Lundi, 7h00 du matin, tout juste sortis du non-décalage horaire, nous débarquons chez le loueur. Situé en plein cœur de Munich dans la maison-mère (là où sont fabriquées les caméras), ARRI RENTAL est un lieu assez petit à l’ambiance très studieuse. On y est chaleureusement accueilli par Sandra Greif, responsable clientèle, qui nous fait découvrir les locaux ; puis c’est au tour d’Ingo, responsable du magasin, de s’occuper de nous.
Première surprise : Ingo est apparemment seul à tenir le magasin. On aperçoit quand même 2 ou 3 personnes dans les ateliers du fond, mais nous n’aurons jamais affaire à eux. Les bancs d’essais sont situés à l’entresol. Nous nous engouffrons donc avec lui dans l’escalier.
Tandis que l’on aperçoit quelques stagiaires affairés à préparer du matériel avant l’arrivée des assistants allemands, nous découvrons notre banc. Voici la photo du box tel que nous l’avons découvert :
Tout est prêt, la caméra est déjà sur pied, chaque caisse est ouverte et organisée suivant leur fonction. On compare la liste initiale avec ce qu’on a. Si peu de choses manque à l’appel. Et soudain, la perspective des prochaines 48h devient un enjeu moins dur à surmonter. La suite nous donnera raison.
Chaque équipe de tournage fait ses essais dans un box individuel équipé d’une mire de définition géante lumineuse montée sur rail avec freinage intégré, d’une ligne téléphonique et d’un accès Ethernet/Wifi. Il y a également une cuisine tout équipée à disposition de l’ensemble des assistants.
Un stagiaire est affecté à chaque box (5 ou 6 boxes en tout). Celui dédié à notre équipe se nomme Mathias et fait preuve d’un zèle fort agréable. Si quelque chose manque, on lui demande. Il va ensuite le récupérer au magasin et nous l’amène. Très pratique quand on a pas de temps à perdre. De la même façon, si on a besoin d’une adaptation particulière (un diamètre de soufflet qui n’existe pas par exemple), c’est encore ce même stagiaire qui va s’occuper de nous trouver une solution, quitte à fabriquer une pièce lui-même ou avec l’aide du magasin si besoin. Du coup, on ne quitte quasiment jamais notre box, essayant de regrouper toutes nos demandes pour plus d’efficacité et gagnant ainsi un temps précieux sur le reste des essais. Pour l’anecdote, lorsqu’on doit bricoler une solution peu conventionnelle pour du matériel, ils parlent de « configuration à la russe ».
Le matériel fut-il à la hauteur de l’accueil ? Il faut avouer qu’il y eut peu de problèmes sur notre parcours. Les optiques étaient calées au cordeau, la caméra fonctionnait comme une horloge suisse, quasiment aucun câble ou accessoire ne manquait à l’appel. Tout marchait à la perfection. Bien sûr, il y eut quand même quelques ajustements à faire, mais pour la plupart, surtout dû au fait que nous souhaitions adapter leur équipements à nos méthodes de travail, bref retrouver certaines bidouilles que nous avions l’habitude d’avoir chez les loueurs français (ici, pas de poignées bleues par ex.). Chez ARRI, les accessoires, c’est du ARRI et c’est tout.
Les journées n’étant pas extensibles, la fin de ce lundi se rapprochait inexorablement. Ouvert de 7h00 à 19H00, ARRI RENTAL laisse heureusement la possibilité aux assistants de rester beaucoup plus tard (et apparemment d’arriver plus tôt aussi). Dans ce cas, passé 19H, il n’y a plus personne pour s’occuper de vous. Le magasin et les autres boxs sont fermés par une grille façon devanture de magasin. Impossible de visiter le banc de son voisin. Puis lorsqu’on a fini, on verrouille son propre box et on va prévenir le gardien qui vient fermer la boutique derrière nous. Les Allemands fonctionnent sur le mode de la confiance, c’est une évidence.
Tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes à l’aube de ce 2e jour.
2e journée
Les vraies difficultés sont venues de là où on s’y attendait le moins.
Lorsque l’on a commencé à préparer le combo, on a voulu récupérer des batteries type 12V/24A. Or en Allemagne (apparemment), l’habitude, c’est plutôt d’avoir du secteur tout le temps. La « façon française » combo-batteries leur a paru surprenante, voire low-tech. Bien sûr, ils avaient tous les câbles nécessaires pour passer en 12V, mais trouver les batteries adéquates a été une entreprise compliquée qui s’est soldée par l’apparition d’une étrange machine (assez efficace) que nous avons surnommé la « Boite à batteries ».
La « Boite à batteries », c’est la synthèse parfaite entre un convertisseur 220V-12V et un bon gros pack de batteries. Équipé de 4 enfichables, le système peut fournir du 12V en cumulant leurs puissances ce qui nous a permis d’alimenter un écran, un KiPro, un convertisseur HD-SD et un émetteur HF. La décharge des batteries est faite en simultanée. Si on a du secteur sous la main, il suffit de brancher la Boite sur du 220V et c’est le convertisseur interne 220V-12V qui prend le relais pour alimenter le combo. Le gros avantage de ce système, c’est qu’ainsi l’ensemble des machines est câblée en XLR 4 broches (via une quadruplette XLR4 !!). Pas besoin de switcher entre les câbles secteur et XLR des appareils. Très pratique. Le passage du 220V au 12V (et vice et versa) est quasi immédiat.
L’autre difficulté a concerné le data management, à savoir l’ordinateur pour décharger les rushes. Nous souhaitions avoir un portable Macbook Pro. ARRI s’y est « poliment » opposé. Pour eux, ce n’est pas une solution fiable et professionnelle. Leur proposition consiste donc en un meuble vidéo contenant une tour MacPro, une batterie de disques durs en interne et un écran 24″, le tout marchant sur 220V avec un onduleur en protection. L’encombrement de la machine était fort peu compatible avec notre tournage. Du coup, l’ordinateur fut trouvé en France.
Finalement ce deuxième jour s’achève et il faut penser à l’inventaire. Chez ARRI, la méthode est la suivante : chaque chose est répertoriée avant notre arrivée, puis tout ce qui nous est donnée pendant les essais est rajouté à cette liste initiale. Une fois les essais terminés, il nous confie le listing complet… et c’est à nous de vérifier qu’on a bien tout ce qui est noté. En cas de litige au retour, cette liste fait foi, donc on vérifie méticuleusement caisse par caisse, câble par câble.
Mardi, 19h00, tout est terminé, le matériel chargé dans le camion. Certes la gravure des bagues, les bouts de velcro par ci par là, les curvers customisés ont été laissés de côté mais le principal est fait.
Pour ceux et celles qui seraient amenés à devoir faire des essais là-bas, allez-y sans crainte. Vous serez entre de bonnes mains.
Post-Scriptum : à l’usage, il s’avère que les BNCs d’ARRI sont un cauchemar pour notre assistant vidéo. Trop rigides, ils font des boucles à l’infini, transformant les traditionnelles séances de déroulage-enroulage en séances de profond désespoir. Lorsque surgit la nécessité d’utiliser un touret de 50m, c’est un sentiment d’effroi qui s’empare du vidéo village… Les Allemands ne travailleraient-ils qu’en HF ?